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Liberté !
Une approche musicale
La liberté ne veut pas dire la même chose pour tout le monde : certain·es la trouvent au sommet d’une montagne, d’autres la situent dans les possibilités du monde numérique. Les libertés pour lesquelles on lutte n’ont pas cessé d’évoluer tout au long de l’histoire.
Au XIXème siècle, le jeune État-Nation se référait à Guillaume Tell, légendaire combattant de la liberté. De nos jours, les libertés individuelles semblent aller de soi. Ils sont protégées par les droits fondamentaux, comme la liberté d’expression.
Aujourd’hui encore, de très nombreuses chansons parlent de la liberté. Dans cette salle, six chorales et groupes de Berthoud interprètent des airs de liberté issus de différentes époques. Sentez-vous libre, écoutez et chantez aussi !
1 L’air de ville rend libre
La franchise de Berthoud de 1273
Au Moyen Âge, la « liberté » consistait dans le fait d’avoir des droits. Les nobles et les villes les consignaient dans des documents. Anna de Kybourg et son mari, Eberhard de Habsbourg, octroyèrent en 1273 des franchises à Berthoud, lui conférant un droit municipal.
Ces franchises réglaient la façon dont les gens devaient cohabiter. Tout le monde n’était cependant pas égal en droits : les personnes établies depuis longtemps avaient plus de droit que celles qui venaient d’arriver, et les hommes plus que les femmes.
La liberté était aussi monnayable : toute personne ayant vécu un an et un jour dans la ville pouvait acheter le droit de bourgeoisie et ainsi s’affranchir du servage.
2 Bien plus que des objets !
Le patrimoine immatériel au musée
Les musées exposent des objets : des biens historiques ou des œuvres d’art. Mais ils s’intéressent également à la musique, à la danse, aux fêtes, aux savoirs ou aux connaissances : c’est ce qu’on appelle le patrimoine culturel immatériel.
Les patrimoines matériel et immatériel sont étroitement imbriqués. Les objets muséaux sont liés aux histoires de celles et ceux qui les ont fabriqués, utilisés et collectés.
Le patrimoine culturel immatériel évolue ; il est vivant. Est porteur ou porteuse du patrimoine immatériel toute personne qui en prend soin et le transmet à la génération suivante, par exemple en étant membre d’une chorale.
3 De la liberté plein les oreilles
Des gens de Berthoud chantent
Sous les dispositifs d’écoute retentissent six chansons évoquant la liberté. C’est des chorales et des groupes de musique de Berthoud qui les ont enregistré en 2023. Les musicien∙nes ont pris la liberté de réinterpréter les chansons, anciennes pour une partie d’entre elles, et ils et elles ont aussi participé à la conception de cette exposition.
À chaque station sonore, les chanteurs et chanteuses évoquent leur interprétation de la liberté et la chanson en question. Des informations sur l’histoire des chansons complètent leurs propos.
4 Foi
Chanson
« Haslibacher Ballade » («La ballade de Haslibacher »), poète inconnu, années 1620, chanté par la chorale Konzertchor Burgdorf, retravaillé par Tim Rebmann, 3 min.
Voix
Le Konzertchor Burgdorf, un chœur profondément ancré dans la vie culturelle de la ville, 1 min.
Liberté
La liberté existe seulement si la diversité a sa place, 1 Min.
Histoire de la chanson
La persécution des anabaptistes dans l’Emmental au XVIème siècle, 1 min.
Chanson «La ballade de Haslibacher »
Nous allons essayer de commencer
Notre chanson sur un vieil homme
Il venait de Haslibach
On l’appelait Haslibacher
De la paroisse de Sumiswald
Que le bon Dieu permit cela
Qu’il fut durement accusé
Evidemment à cause de sa foi
On l’attrapa durement
Et l’amena en ville de Berne
Et une fois qu’il fut prisonnier
Torturé et sévèrement tourmenté
Les seigneurs allèrent le trouver
Tu dois renoncer à ta foi
Ou on te coupera la tête
Le Baptiste parla bien au bourreau
Mangez, buvez, ayez le courage
Car vous allez aujourd’hui même
Verser mon sang innocent
Mais c’est bon pour mon âme
Quand il arriva sur le lieu d’exécution
Il enleva son chapeau de sa tête
Le posa devant les gens
Ma cause est entre les mains de Dieu
Contentez-vous d’annoncer votre jugement
Puis on lui coupa la tête
Qui retomba dans son chapeau
On aurait vu des signes
La bouche du Baptiste ria dans son chapeau
C’est le châtiment et le fouet de Dieu
Voix
Le chœur Konzertchor Burgdorf réunit près de 80 chanteurs et chanteuses passionné·es de musique de Berthoud et des alentours. Il est issu de la fusion de trois chœurs de Berthoud : le Gesangverein, le chœur d’hommes Männerchor Liederkranz et la chorale des instituteurs Lehrergesangverein. Le plus ancien de ces chœurs, le Gesangverein, existait depuis 1805. Dès les années 1970, les trois chœurs ont donné des concerts ensemble, ce qui a mené à la création du Konzertchor. Depuis le printemps 2019, le chœur est dirigé par Gonzague Monney. Le chœur répète aujourd’hui des œuvres importantes et exigeantes de toutes les époques et de tous les genres musicaux, et présente souvent des concerts accompagnés de solistes dans l’église municipale de Berthoud. Ces soirées font désormais partie intégrante de la vie culturelle de Berthoud.
Liberté
Pour les participants et participantes au chœur Konzertchor, la liberté exprime le fait de pouvoir dire, faire et penser ce qu’elles/ils veulent. Elles/ils peuvent participer à façonner la société et ont le droit de mener une vie indépendante et autodéterminée, ce qui les satisfait et les rend heureux. La liberté leur offre ainsi la possibilité de s’épanouir – dans le Konzertchor par exemple. Le fait de chanter ensemble ouvre l’esprit et libère l’âme. Une telle liberté nécessite respect, tolérance et responsabilité envers les autres humains et êtres vivants. Le chant de Haslibacher montre que cela n’a pas toujours été le cas. Hans Haslibacher a été restreint dans sa liberté de croyance par les puissants, et ce droit à défendre sa propre croyance lui était si cher qu’il est mort pour lui. Cette histoire montre que la liberté ne peut exister qu’avec la tolérance et l’acceptation des différences.
Histoire de la chanson
Le 20 octobre 1571, le dernier anabaptiste a été exécuté à Berne : il s’agissait du paysan et prédicateur Hans Haslibacher. Emprisonné, il avait refusé d’abjurer l’anabaptisme, ce qui lui a valu d’être décapité. Comme lui, de nombreux anabaptistes ont été persécutés, arrêtés, bannis ou exécutés pour avoir voulu vivre leur foi. Longtemps, l’Église et les autorités étaient étroitement liés, et les anabaptistes voulaient libérer la foi de ce contrôle, allant ainsi encore plus loin que la Réforme. C’est pour cette raison que le gouvernement a édicté des lois contre les anabaptistes.
La liberté de religion n’existe en Suisse qu’à partir de la fondation de l’État fédéral en 1848, les juifs ayant même dû attendre la révision de la Constitution fédérale en 1874.
Les anabaptistes existent aujourd’hui encore : certains vivent aux États-Unis et s’appellent les Amish. Ils chantent toujours la chanson de Hans Haslibacher, l’anabaptiste de l’Emmental.
5 Censure
Chanson
« Lied der Burgdorfer Schützen » (« Chanson des tireurs »), Gottlieb Jakob Kuhn, 1830, chanté par Cantabella Burgdorf, 4 min. 25 sec.
Voix
Cantabella Burgdorf : d’un chœur d’hommes ouvrier au chœur mixte de Berthoud, 1 min.
Liberté
D’une autre époque, mais jamais censuré. 1 min.
Histoire de la chanson
À propos de fêtes, de tireurs et de libéraux de Berthoud au XIXème siècle, 1 min.
Chanson « Chanson des tireurs de Berthoud »
Bien le bonjour, les frères vaillants !
Les voilà qui s’amusent de nouveau
Au joyeux jeu des armes
Au joyeux jeu des armes
Même si la carabine nous chargeons,
Ce n’est pas à l’ennemi que nuire nous voulons
Que ça pète à cœur joie
Que ça pète à cœur joie
Hallot, hallot, hallot, hallot
Que ça pète à cœur joie
Hallot, hallot, hallot, hallot
Que ça pète à cœur joie
Nous tous voulons être comme nos pères
Et affronter fermement orages et tempêtes
S’il devait y avoir une guerre
S’il devait y avoir une guerre.
Mais avant que les choses ne commencent à se gâter
Nous voulons nous amuser
Être joyeux en buvant du vin
Être joyeux en buvant du vin
Hallot, hallot, hallot, hallot
Être joyeux en buvant du vin
Hallot, hallot, hallot, hallot
Être joyeux en buvant du vin
Alors nous faisons comme les anciens,
Nous portons l’arbalète,
L’épieu et la Morgenstern,
L’épieu et la Morgenstern,
Et certains disent : malheureusement
ces vieux vêtements
ne sont plus à la mode à Berne
ne sont plus à la mode à Berne
Hallot, hallot, hallot, hallot
ne sont plus à la mode à Berne
Hallot, hallot, hallot, hallot
ne sont plus à la mode à Berne
Hé ! N’ayons pas peur
Ce n’est pas l’arme qui donne la bénédiction
Ce n’est pas l’habit qui fait l’homme
Ce n’est pas l’habit qui fait la femme
Si nous voulons être comme nos ancêtres
Unis et solidaires nous devons être
Tout devrait bien se passer
Tout devrait bien se passer
Hallot, hallot, hallot, hallot
Tout devrait bien se passer
Hallot, hallot, hallot, hallot
Tout devrait bien se passer
Et c’est pourquoi, chers frères tireurs,
Faites résonner les chansons suisses
Debout, main dans la main
Debout, main dans la main
Que dans tous les cantons
Règnent paix et unisson
Que vive la patrie
Que vive la patrie
Hallot ! Hallot ! Hallot ! Hallot !
A bas la censure
Hallot ! Hallot ! Hallot ! Hallot !
A bas la censure
Voix
La chorale Cantabella Burgdorf, c’est plus de 50 femmes et hommes de tous âges qui prennent du plaisir à chanter ensemble. Fondée en 1897 en tant que chœur d’homme et sous le nom Grütlimännerchor, elle a été renommée en 1920 Arbeiter Männerchor Burgdorf. En raison de la diminution du nombre de ses membres, il a été décidé en 1990 d’accepter aussi les chanteuses. C’est ainsi que le chœur mixte Gemischte Chor Burgdorf a vu le jour, avant de prendre le nom de Cantabella Burgdorf en 2021.
La chorale chante aujourd’hui des morceaux de tous les genres musicaux : comédies musicales, gospel, musique classique, musique populaire, schlager, pop ou chants spirituels. Tous les 2 ans environ, elle prépare de nouvelles chansons pour un concert de plus grande envergure. Entretemps, elle participe à des rencontres de chorales régionales et nationales et chante avec plaisir lors de messes, dans des EMS ou des fêtes privées quand on l’y invite : les événements sociaux et conviviaux font aussi partie de la vie de l’association !
Liberté
De prime abord, la Schützenlied (« Chanson des tireurs ») irrite les membres de la chorale Cantabella: son contenu semble dépassé et un peu étrange. Mais en regardant son message de plus près, on remarquera vite que celui-ci reste très actuel.
La chanson évoque le fait que tout le monde est responsable de créer le cadre social et de garantir la liberté. Elle rappelle que la liberté a été obtenu par la lutte de personnes qui se sont révoltées dans le passé contre les lois et les autorités et qui n’ont pas accepté la censure. Le droit de participer ne va pas de soi ! La chanson nous encourage à célébrer notre liberté et notre paix, main dans la main mais en restant vigilants. Prenons donc la liberté de travailler ensemble pour construire un avenir positif, stimulant et libre.
Histoire de la chanson
La période qui précède la fondation de l’État fédéral en 1848 est marqué par des révoltes et par la guerre du Sonderbund. Les libéraux cherchaient alors à répandre leurs idéaux inspirés des Lumières, tandis que les conservateurs au pouvoir voulaient les en empêcher. La liberté de presse n’existait pas à cette époque. Donc, les libéraux diffusaient leurs idées au sein d’associations telle que les sociétés de tir et se retrouvaient lors de fêtes nationales.
En 1930, la Fête fédérale de tir se tient à Berne. Les tireurs de Berthoud ont décidé d’y chanter la chanson de Gottlieb Jakob Kuhn, originaire de Berthoud. Les paroles « die alte Schwyzerchleider sin nümme Modä z’Bärn » (« ces vieux habits suisses ne sont plus à la mode à Berne ») n’avaient pas pour eux de signification contestataire, mais le gouvernement conservateur a pris ce choix pour une attaque : leurs « vieux habits », c’est-à-dire leurs idées, ne seraient plus à la mode chez les libéraux. Alors que le gouvernement veut censurer la chanson, les sociétés de tir menacent de quitter la fête. Cette pression suffit pour que le gouvernement bernois renonce à la censure, et depuis, la chanson des gens de Berthoud se termine par la phrase « Drum weg mit der Zensur » (« alors fini la censure »).
6 Mythe
Chanson
« Aemme-Jutz », Willy Felder, 2005, chanté par la chorale Aemmitaler-Chörli de Berthoud, 3 min. 45 sec.
Voix
La chorale Aemmitaler-Chörli entre tradition et modernité, 1 min.
Liberté
La rivière Emme calme, sauvage et libre de toute parole, 1 min.
Histoire de la chanson
À propos de yodel, de nature et de politique en l’an 1848, 1 min.
Voix
La chorale Aemmitaler-Chörli chante des morceaux de yodel traditionnels et modernes, et cultive ainsi les coutumes suisse et l’amour de la patrie. C’est en 1941 que les hommes de la société de gym de Berthoud commencent à se réunir pour interpréter des yodels lors de soirées récréatives. Formellement, la fondation du chœur se fait après la Deuxième Guerre mondiale, en 1947. De nombreux concerts sont donnés au fil des décennies, mais les moments plus forts restent certainement ceux vécus lors de la Fête fédérale des Yodleurs à Berthoud en 1984 et lors de la Fête fédérale de lutte suisse et des jeux alpestres à Berthoud en 2013. Aujourd’hui, le chœur répète chaque jeudi et depuis peu intègre également des yodleuses, en mettant toujours au centre la camaraderie et le partage de moments conviviaux.
Liberté
Pour les yodleuses et yodleurs du chœur Ämmitaler-Chörli, le fait de chanter ensemble dans une chorale rend libre, fait oublier les soucis et rend heureux. Pour ses membres, la liberté consiste aussi dans le fait de faire vivre la tradition. Ils et elles portent des costumes traditionnels et chantent des morceaux de yodel traditionnels et modernes, ce qui leur donne un fort sentiment d’appartenance. Le morceau « Aemme-Jutz » est un yodel naturel, c’est-à-dire qu’il se passe de mots : c’est la mélodie et le rythme qui sont au centre. Ce style de yodel invite donc le public à se mettre à l’écoute de ses émotions, de ce qu’il ressent intimement. Seul le titre « Aemme-Jutz » révèle que la chanson est inspirée de la Emme, ce filet d’eau calme devenant par moment une rivière déchaînée.
Histoire de la chanson
Willy Felder a composé le morceau « Aemme-Jutz » suite à la grande tempête de 2005, lors de laquelle la rivière Emme avait débordé, la nature nous montrant ainsi les limites de notre liberté. En même temps, bien des personnes associent encore la nature au sentiment d’être libre. Lors de l’apparition de l’État-nation, le lien entre nature et liberté a aussi été instrumentalisé à des fins politiques : il n’existait alors ni langue ni culture homogène. Donc les fondateurs ont recouru au mythe de la Suisse libre, au centre duquel se trouvaient les Alpes. Le berger de montagne incarnait l’idylle champêtre, la démocratie directe sous la forme de la landsgemeinde et la liberté – valeurs auxquelles on souhaitait que tou·tes les Suiss·esses s’identifient. Le yodel, chant des alpages, est alors devenu l’hymne de cette liberté mythique. Cette liberté était ce qui devait unir la Suisse, en dépit de toutes les différences religieuses, politiques et linguistiques.
7 Confinement
Chanson
«Längwiligi Ziite» («Des temps ennuyeux»), Lina Wisler-Beck, 1920, chanté par The Rattlesnakes, 2 min. 50 sec.
Voix
The Rattlesnakes – LE groupe de rock de Berthoud, 1 min.
Liberté
Que personne ne doive faire ce qu’il ne veut pas faire, 1 min.
Histoire de la chanson
De la fièvre aphteuse en 1920 à la pandémie du coronavirus en 2020, 1 min.
Chanson «Des temps ennuyeux»
Nulle part de fête populaire, nulle part de la danse
À la maison et autour de la maison on dépérit
Je me suis déjà creusé la tête
Sur ce qu’on pourrait faire pour que le temps passe.
Celui qui a l’habitude de courir et de danser, oh là là
A cause de ces règlements sur les épidémies il souffrira
Tout le monde le dira, ce n’est pas intéressant
Surtout pour les gens célibataires et amusants
C’est pourquoi je reste à la maison et je m’y tiens
Et j’espère que la misère passera un jour
Car je ne suis pas seul, cela affecte aussi les autres
Il faut juste s’y habituer et on deviendra sage
Surtout le dimanche paraît si long
Les sorties sont interdites et fermement
Si quelqu’un nous voyait, il ne manquait plus que ça,
On le paierait cher et je n’ai pas d’argent!
C’est pourquoi je reste à la maison et je m’y tiens
Et j’espère que la misère passera un jour
Car je ne suis pas seul, cela affecte aussi les autres
Il faut juste s’y habituer et on deviendra sage
Voix
En 2015, le groupe de rock Rattlesnakes a célébré son cinquantième anniversaire. Le journal communal de Berthoud leur a alors consacré une double page, ce qui a confirmé le fait que les Rattlesnakes sont une véritable institution à Berthoud. Mais leur réputation va bien au-delà de Berthoud, et le groupe a rayonné jusqu’au niveau européen ! Depuis leur fondation en 1965, les Rattlesnakes ont en effet joué presque partout en Suisse, mais aussi en Allemagne, en France et en Autriche. Jusqu’à nos jours, leur musique est restée fidèle au rock classique, avec du chant à plusieurs voix. Cette chanson sur le thème « Liberté » s’écarte pourtant du style habituel du groupe : elle est née spontanément – les musiciens ayant eu envie d’essayer quelque chose de nouveau à l’occasion de l’exposition.
Liberté
C’est en 1920 que Lina Wisler-Beck rédige le poème « Längwiligi Zitte » (« Temps ennuyeux »), prenant sujet de la fièvre aphteuse qui sévissait alors. Pendant la pandémie de 2020, Jürg Blaser, guitariste et pianiste des Rattlesnakes, découvre avec surprise ce poème et son actualité. Peu de temps avant, Jürg Blaser avait lui-même écrit une chanson sur la situation liée au corona, qui réclamait plus de liberté sur un son et un rythme modernes. Il n’a donc pas pu se retenir de mettre en musique le poème de Lina, en choisissant un style qui aurait pu résonner en 1920.
En 1920 comme en 2020, le gouvernement a retiré aux gens certaines libertés. Ces restrictions ont affecté de nombreuses personnes. Pour Jürg Blaser, c’est une citation de Jean-Jacques Rousseau qui résume le mieux la situation : « La liberté de l’Humanité ne réside pas dans le fait qu’elle peut faire ce que l’on veut, mais que l’on n’est pas obligé de faire ce qu’on ne veut pas. »
Histoire de la chanson
La pandémie du coronavirus a été un événement marquant pour tout le monde. Beaucoup se sont sentis enfermées à la maison pendant le confinement. 100 ans plus tôt, en 1920, c’est la redoutée fièvre aphteuse qui sévissait. Les communes touchées étaient interdites d’accès, la poste désinfectait les lettres, les bals étaient interdits, les bistrots et hôtels fermés, et les grands événements comme la Solätte de Berthoud annulés. Lina Wisler-Beck, habitante de l’Emmental de 22 ans, a alors décrit ses expériences dans le poème « Längwiligi Zitte » (« Temps ennuyeux »).
« Nulle part de fête populaire, nulle part de la danse
À la maison et autour de la maison on dépérit
Je me suis déjà creusé la tête
Sur ce qu’on pourrait faire pour que le temps passe. »
Son poème a été redécouvert en 2020 et publié sur les réseaux sociaux et dans les journaux : on ressent bien son dépit de ne pas pouvoir profiter des précieuses années de sa jeunesse. Le confinement est devenu un exercice d’équilibre entre liberté individuelle et protection des autres. Jusqu’à quel point un gouvernement peut-il restreindre la liberté, et de quel degré de solidarité devons-nous faire preuve en tant que société ?
8 Fuite
Chanson
« Steu dir vor » (« Imagine »), Alizarin, 2022, 2 min. 45 sec.
Voix
Ahmand du groupe Alizarin au sujet du groupe, de la liberté et de la musique, 1 min.
Mustafa du groupe Alizarin au sujet du groupe, de la liberté et de la fuite, 1 min.
Wintana du groupe Alizarin au sujet du groupe, de la liberté et de l’intégration, 1 min.
Chanson
« TDME », Antytila, 2019, chanté par la cholare des classes d’accueil de Berthoud, 3 min. 30 sec.
Voix
Chorale des élèves ukrainien∙nes des classes d’accueil de Berthoud, 1 min.
Chanson « Imagine »
Nous sommes ensemble.
Nous venons de partout.
Nous voulons la liberté et c’est notre souhait.
Je suis comme un oiseau triste,
Chassé de son nid.
Tout ce que je veux, c’est la liberté
Et une vie paisible et digne.
Imagine que la route vers le nord est plus ouverte
Comment ce serait – les personnes réfugiées n’auraient plus besoin de papiers d’identité
Elles seraient les bienvenues, elles seraient chez elles
C’est la bonne direction
Nous pouvons trouver la paix
Si nous nous acceptons
Parce que la paix est dans nos cœurs.
Imagine que la route vers le nord est plus ouverte
Comment ce serait – les personnes réfugiées n’auraient plus besoin de papiers d’identité
Elles seraient les bienvenues, donc elles seraient chez elles
C’est la bonne direction
7000 kilomètres, c’est la distance qu’Abdul a parcourue, de Kaboul à Thoune en passant par Berne, son bien le plus précieux, c’est ton turban en calicot, son dos est couvert de cicatrices d’Istanbul, il n’a pas pu se défendre, il ne parle que le pachtou, pourtant il est content d’être en sécurité, ça va aller.
Les frontières sont fermées, les cœurs sont verrouillés, à quelle porte toquerais-tu si tu étais dans cette situation ?
Imagine que la route vers le nord est plus ouverte
Comment ce serait – les personnes réfugiées n’auraient plus besoin de papiers d’identité
Elles seraient les bienvenues, elles seraient chez elles
C’est la bonne direction
Voix Ahmad
Ahmad est originaire d’Afghanisation et chante dans le groupe Alizarin. Le groupe a été fondé en 2016 dans le centre pour requérants d’asile où Ahmad vivait alors. Un professeur d’allemand avait commencé par chanter des morceaux en dialecte avec les réfugiés adolescents, et bientôt le groupe a donné son premier concert au centre. Aujourd’hui, Alizarin compte sept membres, la moitié née en Suisse et l’autre moitié de réfugiés. Pour Ahmad, la musique est la langue de l’amour et des sentiments, que tous les humains comprennent. La musique surmonte toutes les frontières de langue, de religion, de culture ou de couleur de peau. Même si des personnes ne parlent pas la même langue, elles peuvent se rencontrer et communiquer au travers de la musique et de ses formes d’expression. La musique confère un sentiment de liberté : aucune interdiction ne peut l’arrêter. Ensemble, le groupe réinterprète des morceaux des pays d’origine de ses différents membres.
Voix Mustafa
Originaire de Turquie, Mustafa s’est réfugié en Suisse en 2019. Parce qu’il avait une autre opinion que le gouvernement d’Erdogan, il a été considéré comme un terroriste et emprisonné. En une seule journée, on lui a volé sa vie : il a perdu son emploi, sa formation et tout ce qu’il avait construit. Il ne lui est plus resté que la fuite. Il a dû quitter sa famille, son pays, ses amis, renoncer à sa vie et fuir la Turquie.
La route était dangereuse, et des milliers de personnes sont mortes en chemin. Mustafa fait partie des heureux qui ont réussi. Il est maintenant en Suisse, mais la liberté dont il rêvait n’est pas encore acquise. Des souvenirs traumatisants le rattrapent en permanence et le poursuivent. Pour Mustafa, chaque personne réfugiée est un oiseau blessé, arraché à son nid. Il n’attend cependant pas des Suisses qu’elles et ils le soignent de ses blessures, mais simplement qu’elles et ils le traitent aimablement, d’égal à égal.
Voix Wintana
Wintana vient d’Erythrée. Pour elle, l’intégration est un moyen de se rassembler, plus que de simplement s’adapter. Il s’agit de s’accepter mutuellement et de réussir à comprendre que tout le monde ne pense pas de la même manière. Quand un jour elle riait aux éclats avec une amie, une vielle dame s’en est indignée et lui a dit qu’« ici, on n’était pas en Afrique » et qu’elles parlaient trop fort.
La Suisse est un pays libre, et pourtant souvent Wintana ne se sent pas aussi libre qu’elle l’avait imaginé. Il existe de nombreuses restrictions dans sa vie quotidienne, parce qu’il y a bien des choses qu’elle ne peut pas décider elle-même avec un permis F. Elle a terminé son apprentissage et vit de manière autonome, mais on ne lui permet pas de conclure un abonnement de téléphonie mobile ou de voyager à l’étranger. Wintana a le sentiment d’être socialement intégrée dans pays libre, mais elle n’est pourtant pas entièrement libre.
Chanson « TDME »
Doucement, doucement, arrête le marathon.
Tu te réveilles, ce n’était qu’un rêve.
Il n’y a pas de faux, pas de mots sournois.
Tête claire au lieu de têtes.
Qui a dessiné le film sur l’écran.
Qui a distribué les rôles et s’est maquillé.
Qui n’est qu’une marionnette et qui tire les ficelles.
Il est temps de comprendre.
Woo-woo-woo… parfois rugit le vent.
Et le bateau tangue sur l’eau.
Houh- houh- houh… n’aie pas peur.
A la fin du scénario, il y a une fin heureuse.
Où nous sommes… Où nous sommes…
Où nous sommes… Où nous sommes…
De ce côté de l’écran
De ce côté de l’écran
De ce côté de l’écran
De ce côté de l’écran
Aime librement, embrasse lentement.
Dis aurevoir rapidement ou jamais.
Le temps presse, il faut y aller.
Tu veux la vérité ? Tu dois la trouver.
Les gens se réveillent encore.
Les gens ne se cachent plus.
Une nouvelle profondeur s’ouvre devant nous.
Une époque si intéressante.
Woo-woo-woo… parfois rugit le vent.
Et le bateau tangue sur l’eau.
Houh- houh- houh… n’aie pas peur.
A la fin du scénario, il y a une fin heureuse
Où nous sommes… Où nous sommes…
Où nous sommes… Où nous sommes…
De ce côté de l’écran
De ce côté de l’écran
De ce côté de l’écran
De ce côté de l’écran
Voix
Ce morceau est chanté par des enfants ukrainiens. Suite à l’invasion russe du 24 février 2022, ils ont été chassés de leurs pays d’origine et ont fui la guerre en Suisse. Ils ont depuis trouvé une nouvelle maison à Berthoud, et étudient dans ce qu’on appelle des « classes d’accueil », créées spécialement pour eux.
Tout au long de l’histoire, l’Ukraine a souvent lutté pour sa liberté et son indépendance. Les enfants espèrent et croient que l’Ukraine gagnera cette guerre. Pour l’exposition, ils ont choisi de chanter TDME d’Антитіла (Antitila), une chanson très populaire particulièrement auprès des jeunes. Elle présente aussi le ressenti des ukrainiennes et ukrainiens face à la situation actuelle : elles et ils ne veulent pas être des marionnettes, mais être libre. Et quand les perspectives sont parfois sombres, les paroles de la chanson donnent de la force : « N’aie pas peur. À la fin du scénario, il y a un happy end. »
9 Chante aussi !
Que signifie la liberté aujourd’hui ?
Dans cette boîte insonorisée, vous pouvez exprimer vos idées sur la liberté. Que ce soit en chantant, en parlant, en rappant ou en yodlant – prononcez-vous à cœur ouvert ! À partir des inputs des visiteurs et visiteuses, le musicien de Berthoud Tim Rebmann imaginera un nouveau chant de liberté.
Pas d’idée sur le moment ? Vous pouvez aussi nous transmettre plus tard vos réflexions sur la liberté. Envoyez-nous un message audio de maximum 15 secondes à museum@schloss-burgdorf.ch
10 Chanter encore
Cultiver le patrimoine immatériel
Depuis plus de 200 ans, les gens de Berthoud chantent dans des chorales. Avez-vous envie de chanter aussi ? Les chorales accueillent volontiers de nouvelles voix.
Aemmitaler-Chörli : le club de yodel cultive les coutumes et la convivialité – de préférence en habit traditionnel.
www.jk-aemmitaler-choerli.ch
Alizarin : des habitant∙es de l’Emmental avec et sans parcours de migration chantent ensemble des morceaux d’ici et d’ailleurs.
www.facebook.com/alizarinband
Cantabella Burgdorf : le chœur mixte chante des morceaux de toute sorte. En plus des répétitions et des concerts, ils partagent aussi de moments conviviaux.
www.cantabella.ch
Konzertchor Burgdorf : jeunes et moines jeunes chantent de la musique chorale exigeante de toutes les époques. Le moment fort de l’année est le concert dans l’église municipale.
www.konzertchor-burgdorf.ch
Responsable de projet : Daniel Furter
Scénographie : Nela Weber et Pia Hönger
Collaboration, recherches : Tamara Suter
Ingénieur de son et enregistrements : Tim Rebmann
Pièces sonores : Christina Caprez, Martin Bezzola, Céline Rhiannon Moos
Rédaction : Sarah Caspers
Traductions : Mirjam Grob, Paul Corken, Gabriel Sidler
Nous remercions vivement les chorales et groupes de musique d’avoir participé à la discussion et la création, à la coordination, à l’écriture, aux répétitions et aux chansons. C’est vous qui avez rendu possible cette exposition!
Merci au Museum.BL, Liestal pour la boîte musicale qui est utilisée pour la deuxième fois dans cette exposition.
Nous remercions pour leur soutien à ce projet :
Bernische Winkelried- und Laupenstiftung
Burgergemeinde Bern
Gemeinnützige Gesellschaft Burgdorf
Ursula Wirz-Stiftung
Vontobel-Stiftung
Zwillenberg-Stiftung
Förderclub des Museum Schloss Burgdorf
www.schloss-burgdorf.ch/club